Clore le cycle ouvert il y a 10 ans

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Ce texte a été publié dans La Presse du 14 juin 2021.

Il y a 10 ans, Pierre Curzi, Louise Beaudoin et Lisette Lapointe quittaient le Parti québécois (PQ). Ces trois députés seront rejoints le lendemain par un quatrième, alors méconnu, Jean-Martin Aussant, qui allait fonder Option nationale dans les semaines suivantes. L’hémorragie aurait pu être bien pire pour le Parti québécois : si la fronde avait conduit les autres élus en réflexion à démissionner du caucus, nul ne peut concevoir ce qui serait advenu.

On sait comme les crises sont l’occasion pour les institutions de démontrer leur robustesse et celle-ci n’a pas fait défaut : malgré ces départs, le PQ allait ensuite gagner les élections, mais peu à peu perdre d’influence. Une décennie plus tard, et alors que le mouvement indépendantiste peine à refaire de gains, un bilan de cette séquence mérite d’être opéré.

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Projet Montréal : il est temps de réhabiliter Richard Bergeron

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Projet Montréal tiendra ce soir son événement annuel de financement et célébrera, par la même occasion, les 15 ans de sa fondation. Dans un style on ne peut plus euphémique, les plateformes numériques du parti précisent ainsi que des « citoyennes et citoyens avides de changement » s’étaient réunis pour bâtir une formation politique, autour de l’urbanisme durable, de la qualité de vie et de la saine gestion. 

L’effort de périphrase cache mal l’inconfort du parti à l’égard de Richard Bergeron, celui de ses deux cofondateurs qui le représenta durant trois courses à la mairie. Sans tomber dans la mauvaise psychanalyse de magazine, on peut admettre que le parti a pu chercher à tuer le père pour grandir et devenir ce qu’il est aujourd’hui. 

Convenons-en, le ralliement tardif à Équipe Denis Coderre et certaines déclarations sur son ancien parti n’ont certes pas aidé à faire passer Richard Bergeron à la postérité de Projet Montréal. Toutefois, les stratégies partisanes, aussi critiquables soient-elles, ne doivent pas faire oublier le rôle qu’il a joué. Dans les toutes premières années du parti, rares étaient ceux qui voyaient dans ce projet politique autre chose qu’un ramassis d’hurluberlus environnementalistes et gauchistes à demi crédibles.

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Une voie humaniste et laïque en éducation est possible

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Tribune publiée dans l’édition du 1er avril du quotidien La Presse.

Après la décision de Québec solidaire de revenir sur ce qu’il était convenu d’appeler le consensus Bouchard-Taylor, des fractures durables risquent de diviser les progressistes.

C’est une décision que l’on peut estimer regrettable considérant la tradition humaniste du mouvement laïque. Le projet d’interdiction du port de signes religieux chez les futurs enseignantes et enseignants, y compris avec une clause de droits acquis, semble avoir pesé lourd dans la balance. Toutefois, le dialogue mérite d’être poursuivi en dépit des divergences de fond.

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Une décision qui trouble dangereusement le jeu démocratique

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Exclusions des débats de chefs

Cet article, publié initialement le 3 août, a été modifié suite à la décision de la Cour supérieure le 17 août.
Cette version est disponible sur le site du quotidien La Presse.

La Cour supérieure du Québec a finalement décidé, ce vendredi, de suivre le raisonnement proposé il y a deux semaines, par le Directeur général des élections, qui rendait un avis pour le moins surprenant au sujet de l’exclusion de certaines formations politiques des débats organisés par les télédiffuseurs. Je dis surprenant, pas tant sur la forme puisque les garants de la Loi électorale nous ont habitués à faire preuve de bien peu de zèle en ayant une appréciation minimaliste, pour ne pas dire étriquée, de leur rôle, mais plutôt sur le fond, car cet avis ne tient pas la route une seule seconde. Trois éléments nous permettent de réfuter une argumentation plus que bancale qui revient à vider de sa substance l’article 423 de la Loi électorale. Rappelons que cet article oblige théoriquement les médias, en période électorale, à faire preuve d’équité à l’égard de tous les chefs de partis représentés à l’Assemblée nationale ou qui ont recueillis au moins 3 % des suffrages au précédent scrutin.
En effet, tant le DGEQ que la cour n’assimilent pas les débats à du temps d’antenne gratuit parce qu’il « comporte des règles déterminées par les médias qui l’organisent [et au cours duquel les représentants des partis] n’ont pas la liberté de faire ce qu’ils veulent du “temps d’antenne” ». Ce raisonnement est en parfaite concordance avec la décision rendue en 1994 par la Cour d’appel qui avait rejeté alors une requête du même ordre de Mario Dumont : « le débat n’est pas laissé à l’initiative des partis ou de leur chef politique, mais imaginé, élaboré et organisé par le diffuseur, selon un scénario précis où chaque participant est tenu de répondre à des questions formulées par les journalistes et où l’initiative est prise par ceux-ci et non laissée à ceux qui se prêtent à cet exercice médiatique ». Cette prétendue absence de marge de manœuvre des organisations politiques confèrerait donc le statut de simple émission d’affaire publique à l’un des moments les plus suivis d’une campagne. Or, c’est bien mal connaître l’organisation de tels débats que de croire que les règles sont imposées aux débatteurs. Il est même de notoriété publique que celles-ci sont âprement négociées en amont par des hordes d’avocats et de stratèges en communication et, ce, depuis des décennies. Le premier débat télévisuel du 11 novembre 1962 avait lui-même été au centre de telles discussions entre les équipes de Jean Lesage et Daniel Johnson.
Nous pouvons ensuite noter que la situation de 1994 de M. Dumont ne peut être assimilée pleinement à celle vécue par Option nationale et Québec solidaire. En effet, ces deux partis se voient déjà représentés à l’Assemblée nationale par leur Chef ou l’un de leurs co-porte-parole. Or, ce n’est pas le cas de M. Legault qui, en plus, ne peut non plus se targuer d’être à la tête d’une formation présente à la précédente élection. Cette iniquité apparente ne fait donc que renforcer le sentiment de parti pris et de mépris du cadre légal.
Enfin vient la question du bon sens attaqué. La loi électorale étant tellement interprétée a minima que celle-ci, peu à peu, en perd son esprit. Souvenons-nous qu’il y a quelques mois, le DGEQ se déclarait incompétent à étudier les contributions de la « pré-CAQ » version OSBL, puisqu’elle n’était pas un parti politique reconnu. Pourtant, en vertu de la Loi électorale, on pouvait légitimement soupçonner que cette dernière faisait la promotion du parti à venir avec des contributions exceptionnellement généreuses de citoyens. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, en suivant ce raisonnement rigoriste et pusillanime à la situation qui nous occupe ici, les débats en période électorale pourraient aisément être inéquitables « qualitativement et quantitativement », sans même que cela puisse être remis en cause par les garants de la Loi électorale du Québec et de la Loi sur la consultation populaire.
Nous ne pouvons évidemment que regretter cet ensemble de décisions qui dénotent une certaine complaisance vis-à-vis de la hiérarchisation faite, probablement de bonne foi, entre les formations politiques. En effet, cette hiérarchisation revient souvent à condamner certaines d’entre elles au silence. Il est d’autant plus dommageable qu’en agissant de la sorte, les groupes télévisuels les confinent finalement à un rôle d’arrière-plan avant même que les citoyens aient pu se prononcer et contribuent par la même à brouiller le jeu électoral. Comment réagiront notamment les milliers de jeunes qui appuient Option nationale et Québec solidaire, principales victimes de ces décisions? Ne sommes-nous pas là en train d’alimenter le cynisme en tournant les coins ronds? Qu’il s’agisse des élections à date fixe ou de l’encadrement des temps d’antenne en période électorale, en passant par un scrutin plus respectueux de la diversité des opinions, il est grand temps de dépoussiérer le jeu démocratique québécois.