Dans le cadre du cours de système politique montréalais, il m’a été donné le privilège d’effectuer une entrevue d’une vingtaine de minutes avec le conseiller de ville Guillaume Lavoie. Cette entrevue portait sur des considérations budgétaires, plus particulièrement sur la remise des documents nécessaire avant la tenue d’un vote, sur la présentation des données et sur la reddition de compte. Ce texte sera donc un compte rendu qui fera un retour sur les grandes lignes et arguments présentés par le conseiller.

Le premier sujet de l’entrevue portait sur la remise des documents avant les votes en conseil municipal, plus particulièrement sur la problématique que représentent les dépôts séance tenante. Lors de l’entrevue, M. Lavoie débute par présenter le cadre légal actuel en disant que la procédure de dépôt de document actuel oblige seulement de remettre aux conseillers, un certain temps avant le vote, le libellé de ce sur quoi le conseil se prononcera . Par contre, il arrive souvent que les analyses des fonctionnaires, les documents pertinents et les contrats ne soient que remis lors du conseil et non avant. En recevant les documents séance tenante, les conseillés ne peuvent pas faire d’analyse approfondie des contrats qu’ils doivent voter, ni préparer des questions par rapport à ces contrats, par manque de temps. Le conseiller ajoute ensuite que souvent, les gens perçoivent les dépôts séance tenante comme étant quelque chose de rare et concernant souvent des choses simples et sans réelle incidence sur la gestion de la ville. Cependant, suite à une analyse de M. Lavoie, on constate que, depuis novembre 2013, il s’est voté 170 millions de dollars de contrat à la ville de Montréal lors de séance tenante, donc que les conseillers n’ont pas pu lire. Il donne ensuite l’exemple des villes françaises qui envoient tous les documents pertinents à ses conseillers au moins cinq jours avant la tenue d’un vote et les exemples de Toronto et de New York ayant des mesures semblables. Puis, ce dernier ajoute que ce n’est pas parce que la loi permet une chose, qu’on doit le faire. Il explique le cas de Gatineau et de Québec qui, suite à l’arrivée de nouvelles administrations, ont renoncé aux dépôts séance tenante de documents pertinents . Ainsi, selon M. Lavoie, les dépôts séance tenante de documents sont nuisibles à la démocratie municipale parce que le début de la mauvaise gestion, c’est que les conseils municipaux acceptent de voter des choses qu’ils n’ont pas lues. D’ailleurs, M. Lavoie a déposé le 27 avril dernier une motion au conseil de ville de Montréal demandant que le comité exécutif remette tous les documents pertinents aux sujets inscrits à l’ordre du jour définitif au moins trois jours avant la date de la séance du conseil de Ville de Montréal.

Le deuxième sujet porte sur la présentation des données dans le budget. Le point soulevé ici par M. Lavoie est que la présentation des données budgétaires ne permettait pas une analyse correcte du budget et nuisait à la transparence. Afin de prouver son point, il explique que la transparence ne veut pas seulement dire d’avoir accès à l’information, mais d’aussi pouvoir l’interpréter, en d’autre terme, si l’information est mal présentée, elle ne veut rien dire. Il nous informe ensuite que la présentation du budget montréalais a toujours été présentée en deux colonnes : une pour le budget de l’année précédente et l’autre pour le budget allant être voté. Un écart entre les dépenses des deux budgets était aussi fourni. Néanmoins, le budget est seulement une prévision des dépenses, pas les dépenses réelles. Ainsi, en montrant le budget de l’année précédente, on ne prend pas en considération les dépenses réelles, mais les dépenses prévues. La présentation budgétaire de Montréal ne se basait pas sur le « réel », parce qu’elle ne prenait qu’en compte des budgets et non des dépenses et des revenus à la fin de l’année : « sur la fiction de l’an dernier nous construisions la fiction de l’année prochaine ». En s’inspirant d’exemples internationaux et nationaux (Québec, Paris, Londres, etc.), une motion a été adoptée en conseil municipal. Maintenant, le budget montréalais aura six colonnes : les trois premières colonnes seront les résultats réels des trois années précédentes, la quatrième sera le budget de l’année en cours, la cinquième sera le réel estimé de l’année en cours et la sixième sera la proposition budgétaire pour l’année qui vient. Cette solution permet donc de se baser sur du réel lors des débats entourant le budget municipal.

Partant du sujet de la transparence, l’élu dit que la présentation actuelle des données ne permet pas une reddition de compte efficace. La reddition de compte est une opération qui permet de vérifier comment une entité recevant une responsabilité  assume cette responsabilité. Dans le contexte municipal, l’entité recevant une responsabilité est l’administration municipale et la responsabilité qu’elle reçoit est celle de pouvoir gérer un budget pour bien mener ses activités. M. Lavoie explique que pour éviter de devoir voter toutes les dépenses faites par l’administration, la ville délègue un certain pouvoir d’achat aux administrations en votant une résolution permettant un montant prédéterminé de dépenses possibles en échange de preuves d’achats. Toutes les dépenses de plus de 2000 $ sont alors inscrites dans un rapport soumis au conseil mensuellement et dans un rapport annuel. Le conseiller nous apprend que le rapport annuel est composé d’environ 1350 pages où chaque achat est une ligne et est classé par ordre alphabétique. Cependant, M. Lavoie indique que cette présentation des données nuit à la reddition de compte parce que « trop d’informations tuent l’information » et parce que le classement ne rend pas intelligible l’information présentée. Selon lui, les données doivent être des outils pour mieux gérer la ville, mieux analyser les priorités et pour savoir si l’argent est dépensé efficacement. La reddition de compte ne doit pas se faire seulement par l’accumulation d’information, mais aussi par l’organisation efficace de ces données afin de pouvoir en tirer des conclusions. Pour arriver à cela, le conseiller propose de mettre les contrats par ordre décroissant de valeur parce qu’on doit prioritairement observer les grandes dépenses avant les petites. Il propose aussi de mettre un regroupement par fournisseur parce que la présentation actuelle ne fait pas de total par fournisseur. Il indique que l’important, ce n’est pas le nombre de contrats donnés à tel fournisseur, mais de savoir combien ce fournisseur à reçu de la ville. De plus, il propose que d’ajouter un regroupement par famille de dépense soit utile. Ainsi, il serait évident de savoir combien d’argent la ville dépense en formation ou en location de voiture, ce que la présentation des contrats actuelle ne permet pas.

Entrevue avec Guillaume Lavoie


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Guillaume Lavoie

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Entrevue avec Guillaume Lavoie, conseiller de ville dans le district de Marie-Victorin et porte-parole de l’opposition officielle en matière de Finances et de Relations gouvernementales et internationales. Cette entrevue, s’inscrivant dans le cadre du cours « Système politique montréalais », porte sur la transparence, la reddition de compte et la présentation du budget dans un contexte municipal.